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Culte du dimanche : les Chiens de Paille

posté le 08/12/2013

Retour dans la violence du cinéma américain des années 70 avec Dustin Hoffman s’invitant chez Sam Peckinpah dans le culte du dimanche : Les Chiens de Paille.

Après le succès et le choc violent du western La Horde Sauvage, Sam Peckinpah est définitivement classé comme le mauvais garçon d’Hollywood, un réalisateur qui ne rechigne pas à montrer la violence de ses personnages et de l’humanité. C’est ainsi qu’il s’est vu proposé la réalisation de Délivrance avant que le studio ne se ravise et ne confie cette tâche à John Boorman qui s’en est tout de même occupé avec maestria. Mais ce n’est pas pour autant que le réalisateur va se laisser abattre puisqu’il s’embarque alors dans l’adaptation du roman de Gordon Williams, The Siege of Trencher’s Farm.

Comme souvent pour ce genre de thriller, l’histoire est simple. Un jeune mathématicien américain déménage avec sa femme dans l’arrière pays britannique pour travailler au calme. Mais rapidement, les ouvriers qu’il fait travailler à la réhabilitation de sa ferme vont devenir oppressants, le point culminant lorsqu’il se décidera de s’opposer à eux en protégeant l’idiot du village accusé de meurtre. Pourtant, malgré cette apparente simplicité, Peckinpah dessoude quelques codes du cinéma bien pensant.

En effet, le réalisateur mène son thriller de main de maître dans un lieu quasi unique pour instaurer une pression qui monte au fur et à mesure et se révélera pleinement dans le tournant central qu’est une scène de viol assez insoutenable à regarder (au moins à l’époque) ajoutée au scénario de base. Jusque dans un final étouffant lorsque le couple est assiégé par leurs agresseurs qui n’hésitent pas à démolir la représentation des forces de l’ordre et doit se défendre par tous les moyens possible, Pekinpah nous maintient sous tension avec une noirceur et une violence qui ont de quoi secouer les plus endurcis. Cette violence est d’ailleurs accentuée par un montage savamment orchestré pour mettre le spectateur mal à l’aise, n’hésitant pas à télescoper différentes séquences comme le viol et l’éloignement de Hoffman parti à la chasse.

Mais cette violence affichée et revendiquée dans tout le cinéma de Pekinpah n’est pas non plus gratuite. Car le réalisateur dresse d’une part un portrait peu reluisant de ce patelin paumé et de ses habitants vus comme des animaux. Mais surtout il va nous montrer comment un homme parfaitement civilisé et aux convictions fortes va devoir, dans des conditions de menaces extrêmes aller à l’encontre de celles-ci pour les défendre. Une position paradoxale et pourtant réaliste, montrant bien l’être humain sombrant dans la violence, inéluctablement, devenant l’animal qu’il refuse d’être. Un comportement d’autant plus paradoxal qu’il se montre psychologiquement de plus en plus violent avec sa femme qu’il commence à ne plus comprendre, sans savoir ce qu’elle a subit.

Grâce à Peckinpah, Dustin Hoffman, qui commençait déjà a avoir un nom bien connu depuis le Lauréat, trouve là l’un de ses meilleurs rôles. Avec ce personnage rempli de contradictions, complexe, et devant faire preuve d’un charisme énorme, il inaugure de belle manière la meilleure décennie de sa carrière (suivront Papillon, Les Hommes du Président ou encore Marathon Man). Malheureusement il n’en sera pas tout à fait de même pour Susan George dont la carrière aura du mal à décoller, sans doute trop identifiée à la victime.

Thriller à a tension immense et à la violence aussi provocatrice (le film a été censuré dans plusieurs pays à sa sortie), exemple même de l’ambiance viscérale qui entourait un certain cinéma des années 70, que réflexive sur la nature profonde de l’homme qui restera toujours son propre ennemi, Les Chiens de Paille reste sans doute l’un des films méconnus qui auront pourtant eu un impact certain sur la représentation de la violence et la mise sous pression du spectateur.

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