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Culte du dimanche : Le Silence des Agneaux de Jonathan Demme

posté le 07/10/2018

Le serial killer le plus charismatique du cinĂ©ma, 2 acteurs grandioses et un thriller matriciel des annĂ©es 90. VoilĂ  ce que nous a offert Le Silence des Agneaux. On se devait bien d’en parler dans le culte du dimanche, en espĂ©rant qu’il sortira un jour en bluray dans nos contrĂ©es.

Au dĂ©but des annĂ©es 80, l’auteur Thomas Harris sort Dragon Rouge, thriller efficace qui met en scène un personnage singulier, Hannibal Lecter. Le roman sera adaptĂ© par Michael Mann quelques annĂ©es plus tard tout en restant relativement confidentiel. La suite, intitulĂ©e Le Silence des Agneaux, sortira en 1989, et son adaptation se fera plus rapidement.

Ted Tally Ă©crit alors un scĂ©nario pour Gene Hackman qui pensait faire le film. Le script est particulièrement prenant et violent et c’est Jonathan Demme qui s’empare du sujet. Le rĂ©alisateur est aguĂ©rri mais n’a pas forcĂ©ment connu de grand succès public en quinze ans de rĂ©alisation. Cela ne l’empĂŞche pas de vouloir plonger dans le thriller et de s’entourer d’acteurs talentueux mais pas encore des superstars. On peut mĂŞme dire qu’il s’agissait de seconds choix puisque Robert Duvall et Michelle Pfeiffer devaient Ă  l’origine tenir les rĂ´les d’Hannibal Lecter et Clarice Starling. Toutefois, devant l’insistance de Jodie Foster, le rĂ©alisateur finira par craquer et grand bien lui en prendra.

Plus qu’un thriller, un film psychologique

Le scénario et le film reprennent donc la trame du roman de Thomas Harris avec la jeune étudiante du FBI Clarice Starling qui va interroger le docteur incarcéré Hannibal Lecter afin de pouvoir coincé un serial killer connu sous le pseudonyme de Buffalo Bill, écorchant ses victimes. Un concept pas si éloigné du premier livre à ceci près que la personne interrogeant Lecter, est une femme, débutante, ce qui offre alors une dimension psychologique bien plus intéressante et donne au film toute sa tension.

En effet, loin de s’aventurer dans une simple trame de serial killer, le film est avant tout une plongĂ©e dans l’esprit de Clarice et la naissance d’une relation ambigue avec un autre monstre. Buffalo Bill n’est qu’un prĂ©texte grossier (d’ailleurs la description de la transexualitĂ© du personnage est assez maladroite et typique des annĂ©es 80/90) pour s’intĂ©resser Ă  Clarice et Hannibal. Le rĂ©alisateur l’a bien compris et va bien plus travailler la mise en scène de ces sĂ©quences de rencontre avec ce qu’il faut de suggestion pour nous faire froid dans le dos.

Un couple malsain

Il faut dire que le personnage d’Hannibal Lecter est fascinant. DĂ©crit d’emblĂ©e comme un monstre cannibale et par les atrocitĂ© qu’il a pu commettre, sa première apparition est celle d’un gentleman, un homme de goĂ»t, dont on perçoit tout de suite l’appĂ©tit pour la manipulation. Anthony Hopkins, alors second rĂ´le confirmĂ© et reconnu pour ses prestation théâtrales, offre au personnage toute l’ambiguitĂ© qu’il faut et rend, Ă  travers son regard perçant et son verbe malin, Hannibal Lecter imprevisible et aussi sĂ©duisant qu’effrayant, loin de la sauvagerie clichĂ©e du genre.

Face Ă  lui, il a sans doute l’un des personnages fĂ©minin les plus forts des annĂ©es 90 (et que l’on peut avoir tendance Ă  oublier face aux Sarah Connor ou Elen Ripley). Clarice Starling est en effet une jeune recrue du FBI qui veut faire ses preuves, mais qui a aussi quelques soucis Ă  rĂ©gler avec son passĂ©. Plus l’enquĂŞte avance et plus elle Ă©changera avec Lecter, plus elle sortira de sa chrysalide pour rĂ©vĂ©ler tout son potentiel. Mais en mĂŞme temps, elle tombera d’une certaine manière sous le charme du cannibale en cage. A ce jeu, Jodie Foster, rĂ©vĂ©lĂ©e par Scorsese et qui a enchaĂ®nĂ© les petits rĂ´les dans les annĂ©es 80, offre Ă  Clarice toute sa fragilitĂ© et en mĂŞme temps une force intĂ©rieure folle qui rend son personnage mĂ©morable, et malgrĂ© la diffĂ©rence d’experience fait largement le poids face Ă  Hopkins.

Pierre angulaire du thriller des 90’s

Avec ce duo, Demme nous offre peut-ĂŞtre mĂŞme l’une des relations les plus tordues entre deux personnages dans un thriller (relation qui sera encore plus marquĂ©e dans la suite de Ridley Scott 10 ans plus tard) et c’est ce qui nous fera grandement frissonner et nous restera en mĂ©moire longtemps après la sortie du film. Ce n’est d’ailleurs pas Ă©tonnant de ressentir un petit truc Ă  chaque fois que l’on voit Anthony Hopkins et Jodie Foster rĂ©unis lors de photoshoot anniversaires ou de cĂ©rĂ©monies. Mais le rĂ©alisateur n’oublie pas non plus le cĂ´tĂ© plus purement horrifique du film avec la spectaculaire et saignante Ă©vasion de Lecter qui offre une image mythique de mise Ă  mort, et un dernier face Ă  face avec Buffalo Bill dans l’obscuritĂ© particulièrement tendu.

Tout cela fait alors en 1991 du Silence des Agneaux un grand thriller psychologique et horrifique qui marquera le genre durablement et influencera forcĂ©ment l’autre pierre angulaire du genre qui arrivera ensuite (Se7en). Mais le film marquera aussi avec un fort succès public et critique et une cĂ©rĂ©monie des oscars qui osera enfin donner des recompenses majeures Ă  un thriller. Remporter la quinte royale (meilleurs film, rĂ©alisateur, acteur, actrice et scĂ©nario) n’est pas donnĂ© Ă  tout le monde et il l’a fait. Des rĂ©compenses qui feront d’ailleurs de Jodie Foster et Anthony Hopkins des tĂŞtes d’affiche et qui permettront Ă  Demme d’enchaĂ®ner avec Philadelphia.

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