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Suicide Squad, critique

posté le 03/08/2016

La bande de vilains de DC Comics dĂ©barque au cinĂ©ma … pour se prendre les pieds dans le tapis. Suicide Squad est loin du film impertinent et sombre que l’on pensait avoir pour se rapprocher d’un vrai dĂ©sastre artistique.

Sur le papier, de bonnes choses Ă©taient rĂ©unies. Le Suicide Squad, assemblage de tueurs au service du gouvernement, qui a pris sa forme la plus concrète dans les annĂ©es 80 paranoĂŻaques en comics, adaptĂ© par un spĂ©cialiste du polar et film brut (David Ayer, scĂ©nariste de Training Day et rĂ©alisateur de End of Watch et l’excellent Fury) avait Ă  priori une bonne intention de dĂ©part. Mais ici, très rapidement, on sent que le film Ă©chappe complètement Ă  tout contrĂ´le pour foncer droit dans le mur et ce n’est pas ce qui va arranger Warner qui espĂ©rait remonter la barre après la relative dĂ©ception de Batman V Superman.

Ayer nous la joue donc 12 Salopards avec son groupe de vilains hĂ©tĂ©roclites allant du braqueur de banque au tueur cannibale en passant par la foldingue, le mercenaire ou le pyromane tatouĂ©, rassemblĂ©s de force (un petit explosif dans la nuque en cas de dĂ©rapage) par les services secrets pour Ă©ventuellement mettre fin Ă  des menaces auxquelles ne peuvent pas faire face de simples soldats. Leur première mission, retrouver un colis alors qu’un dĂ©mon est en train de dĂ©truire le centre-ville et qu’un certain clown  fait des siennes.

Il ne faudra pas longtemps avant de s’apercevoir que quelque chose cloche avec ce Suicide Squad montĂ© Ă  la serpe. Les premières sĂ©quences nous prĂ©sentent donc Ă  gros renfort de hip hop ou rock FM (toujours mal placĂ©) les principaux membres du groupes alors que d’autres passeront Ă  la trappe, crĂ©ant tout de suite un dĂ©sĂ©quilibre entre les diffĂ©rents personnages et donc une absence totale d’esprit de groupe qui peinera Ă  se former puisqu’ils seront ensuite directement balancĂ©s au coeur de l’action. Et parmi les personnages prĂ©sentĂ©s, il y a Deadshot aka Will Smith qui se taille la part du lien alors qu’il n’est que peu crĂ©dible en tueur froid, insistant mĂŞme sur la protection de sa fille pour paraĂ®tre plutĂ´t gentil aux yeux du public familial du film.

L’acteur est alors reprĂ©sentatif du symptĂ´me qui va contaminer tout le film, des bad guys qu’on ne voit finalement jamais mĂ©chants (toujours soit amoureux soit remplis de remord, au pire donnant quelques coup) et qui font que le film n’assume alors jamais son concept. Ici les personnages sont aussi inoffensifs que des moutons dans un film qui ne sait mĂŞme pas quel ton adopter, entre des tentatives d’humour et de coolitude Ă  la Gardiens de la Galaxie sans en avoir l’authenticitĂ© ou la noirceur du sujet qui disparaĂ®t sous la loi du PG-13 alors que le film aurait gagnĂ© Ă  assumer une posture beaucoup plus violente et dĂ©lirante (ce qu’aurait vraiment pu ĂŞtre Deadpool) que la gentille sucrerie offerte ici.

Mais revenons en aux personnage. Car après Will Smith qui vampirise le film avec sa guimauve, c’est la dĂ©lirante Harley Quinn qui devient la vedette du film et qui retient l’attention, et pas seulement Ă  cause de sa petite culotte (mĂŞme si le rĂ©alisateur se fait plaisir de ce cĂ´tĂ© lĂ ). Margot Robbie apporte Ă  l’arlequin prĂ©fĂ©rĂ©e du Joker tout le dĂ©lire et la lumière qu’il faut, et malgrĂ© le peu de matière Ă  disposition dans l’Ă©criture navrante du film c’est la seule qui arrive Ă  en tirer quelque chose. Car disons le clairement, tout le reste du casting est complètement Ă  la ramasse avec aucun personnage mĂ©morable ou attachant, tous aisĂ©ment sacrifiables et remplaçables. Il faut dire que les comĂ©diens ne sont pas aidĂ©s par une Ă©criture particulièrement mauvaise qui peine Ă  ĂŞtre cohĂ©rente et Ă  rĂ©vĂ©ler clairement les intentions de chacun, mĂŞme au dĂ©tour d’une scène de dialogue dans un bar Ă  l’issue de laquelle ils se rendent compte qu’ils sont finalement assez proches et deviennent comme par magie une gentille famille.

Un dĂ©faut d’Ă©criture qui massacre aussi l’autre grand personnage attendu au tournant et qui a fait l’objet de toutes les attentions de la presse, le Joker. L’ennemi mortel de Batman et amant d’Harley Quinn campĂ© par Jared Leto est simplement la pire incarnation du clown Ă  se jour. Non que l’intention d’interprĂ©tation et que le maquillage ne soient pas bons, mais encore une fois, le personnage est très mal Ă©crit et amenĂ©. Non seulement il ne sert strictement Ă  rien dans la trame du film, mais en plus il ne passe ici que pour un gangster bling bling sans grande personnalitĂ© Ă  un tel point qu’on l’imagine pour l’instant mal faire face au charismatique Batman de Ben Affleck ! On espère que pour sa prochaine apparition dans l’univers cinĂ© de DC, il bĂ©nĂ©ficiera d’une meilleure Ă©criture pour que Jared Leto ait quelque chose Ă  dĂ©fendre car il se sent ici particulièrement Ă  l’Ă©troit.

Mais l’Ă©criture des personnages n’est pas le seul problème du film car globalement c’est l’Ă©criture gĂ©nĂ©rale du film et son montage qui sont aussi Ă  plaindre. Car en plus de dĂ©rouler une histoire sans intĂ©rĂŞt avec des personnages dont on se fiche complètement, rien ne tient la route avec des sĂ©quences qui ont du mal Ă  ĂŞtre liĂ©es ensembles, des scènes d’actions qui s’enchaĂ®nent dans une indiffĂ©rence gĂ©nĂ©rale aux retournements de situation bĂŞtes et une menace pathĂ©tique digne d’un mauvais blockbuster fantastique des 90’s. Sans compter les coupes pour ĂŞtre toujours tout public. On sent clairement le remontage du film en catastrophe par le studio et qui se rĂ©vèle du coup incohĂ©rent, dĂ©sastreux et aboutit Ă  ce produit qui n’assume rien de ce qu’il est, ne sait pas sur quel pied danser et devient un gloubiboulga sans intĂ©rĂŞt.

Warner voulait faire de Suicide Squad l’Ă©vĂ©nement qui lançait pour de bon le DC Cinematic Universe après l’incartade Batman v Superman. Mais ce n’est au final qu’un produit mal fichu et mĂ©chamment calibrĂ©, clairement pas Ă  la hauteur de sa promo, encore moins Ă  la hauteur de son potentiel qui devrait atterrir aux cĂ´tĂ© d’un Green Lantern de sinistre mĂ©moire. Il serait dĂ©sormais temps chez Warner de redonner aux rĂ©alisateurs leurs pouvoir et d’avoir une idĂ©e plus claire de ce qu’ils veulent faire de la licence DC.

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