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Under the Skin, critique

posté le 01/07/2014

Scarlett Johansson est une mangeuse d’hommes. Ce n’est pas nouveau mais Under the Skin en donne une vision particulière, Ă©trange, perturbante, dĂ©concertante.

Si le rĂ©alisateur Jonathan Glazer n’a pas rĂ©alisĂ© un seul film en 10 ans, c’est parce qu’il s’est consacrĂ© presque entièrement Ă  la crĂ©ation de Under the Skin, adaptĂ© du roman de Michel Faber. Recherche de financement dĂ©licate, Ă©criture peaufinĂ©e jusqu’au bout, dĂ©veloppement de camĂ©ras spĂ©ciale, recherche de l’actrice idĂ©ale,  travail dans le dĂ©tail sur le son … il aura pris son temps pour raconter l’histoire de cette extra-terrestre qui circule en Ecosse en kidnappant des hommes solitaires pour en faire on ne sait quoi.

Sur ce pitch, on aurait facilement pu obtenir une sĂ©rie B faisant office de plaisir coupable comme nos souvenirs de la Mutante peuvent l’Ă©voquer. Mais il n’en sera rien car d’emblĂ©e le rĂ©alisateur nous plonge dans une ambiance Ă©trange oĂą les images et les sons parlent bien plus que le peu de mots qui sont exprimĂ©s. CentrĂ© entièrement sur le point de vue de cette extra-terrestre, le film nous fait part de se prise de conscience, petit Ă  petit de l’humanitĂ© qui pourrait la gagner, ou des questions qu’elle peut se poser sur les hommes qu’elle dĂ©couvre, tout aussi Ă©tranges qu’elles, menĂ©s par leurs pulsions.

HĂ©las, le film se rĂ©vèle très vite refermĂ© sur lui-mĂŞme, ne s’offrant jamais au spectateur et le caressant mĂŞme Ă  rebrousse-poil, ne cherchant jamais Ă  l’inclure dans sa trame. Les pistes inexploitĂ©es ne feront qu’accentuer cet Ă©cart et les questions que nous n’avons pas envie de nous poser nous feront prendre encore plus de distance. Qui est ce motard qui semble Ă  la poursuite de l’alien ? que deviennent les corps kidnappĂ©s ? Autant de questions sans rĂ©ponses et qui ne mĂ©ritaient pas d’ĂŞtre posĂ©es tant elles ne nous intĂ©ressent pas et nous sortent alors de la dĂ©couverte de l’humanitĂ©, de la solitude dĂ©solĂ©e par cette extra-terrestre sans repères.

Avec un style camĂ©ra cachĂ©e cherchant une certaine rĂ©alitĂ© qui est loin d’ĂŞtre sexy mais captant au contraire les aspects les plus brumeux de son histoire et de ses dĂ©cors avec un rythme lent, il sera difficile d’entrer dans le film et deux rĂ©actions sont alors possible : la fascination ou le rejet total. Et votre rĂ©action sera alors bien diffĂ©rente selon ce que vous avez envie de voir et de dĂ©couvrir et des questions sur lesquelles vous voulez rĂ©flĂ©chir ou non Ă  la sortie. Car certaines images restent forcĂ©ment en mĂ©moire mais le rythme lent nous laisse toujours somnolent, d’un ennui total.

Et dans le film, il y a donc Scarlett Johansson. Celle qui a trouvĂ© son meilleur rĂ´le en n’Ă©tant que la voix de Her sera ici pratiquement muette et offrira juste son corps. Mais loin de chercher Ă  renvoyer une image purement sexy et dĂ©sirable, elle n’est finalement qu’un corps servant Ă  attirer les hommes dans un piège sombre et au son Ă©trange. Le jeu mutique de l’actrice qui incarne ici une alien aussi dĂ©shumanisĂ©e que possible, ne comprenant pas ce qu’il se passe est aussi prenant que le film, soit on y adhère, soit on le rejette. Certes, au 3e degrĂ©, dans Under the Skin, Scarlett s’interroge sur son image d’actrice et sur l’image de son corps au cinĂ©ma et l’on peut saluer l’audace qu’elle a eu n dĂ©cidant de s’aventurer dans ce film si particulier, mais cela n’en fait pas forcĂ©ment un grand rĂ´le.

DĂ©routant et dĂ©veloppant autant que questions inutiles que d’ennui total, Under the Skin navigue sans cesse entre le film de SF fascinant et le film d’auteur sans budget et prise de tĂŞte pour pas grand chose. Étrange.

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