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Culte du dimanche : l’Etrange Histoire de Benjamin Button de David Fincher

posté le 05/10/2014

Avec la sortie de Gone Girl, c’est l’occasion de revenir sur l’un des films de David Fincher et le choix est difficile Ă©tant donnĂ© son parcours sans fautes. Et dans une carrière remplie de films qui mettent Ă  mal leurs personnages et la sociĂ©tĂ©, le plus classique et romantique mais aussi l’un des plus audacieux est sans aucun doute l’Étrange Histoire de Benjamin Button.

Après les dĂ©monstrations insolentes de Fight Club ou Panic Room, le surdouĂ© David Fincher avait bluffĂ© tout le monde avec Zodiac. En apparence plus posĂ©, il montrait qu’il pouvait gĂ©rĂ© un rĂ©cit qui prend son temps avec une maĂ®trisede l’image qui prenait un autre sens. Comme si il s’Ă©tait calmĂ©. Son projet suivant faisait fantasmer le tout Hollywood depuis des annĂ©es, une adaptation d’une nouvelle de F Scott Fitzgerald (Gatsby le Magnifique) dans laquelle un homme naissait vieux puis rajeunissait. Le rĂ©alisateur a donc attendu que les progrès des effets spĂ©ciaux soient suffisamment crĂ©dibles pour nous emporter dans l’histoire.

Si le projet a Ă©galement mit du temps Ă  se concrĂ©tiser, c’est parce qu’en plus de la valse des rĂ©alisateurs (Ron Howard, Spike Jonze entre autres) qu’il a connu, le couple star a de nombreuses fois changĂ© avant de que Cate Blanchett et Brad Pitt (qui entame alors sa 3e collaboration avec le rĂ©alisateur) ne soient rĂ©unis, après leur rendez-vous manquĂ© sur the Fountain de Darren Aronofsky. Avec ces deux grands acteurs, Fincher adapte donc la nouvelle en la situant juste après la première guerre mondiale. Ainsi notre hĂ©ros va traverser toutes les grandes Ă©tapes du XXe siècle, de son enfance en maison de retraite pendant la grande dĂ©pression, son engagement sur le front de la seconde guerre, et sa jeunesse pendant les 30 glorieuses.

Après avoir fait durer une enquĂŞte sur plusieurs annĂ©es dans Zodiac, David Fincher rĂ©alise donc Ă  nouveau un rĂ©cit sur le temps qui passe. Une notion qui dĂ©bute dès le commencement du film avec cette touchante histoire sur une horloge qui fonctionne Ă  l’envers, Ă©tablissant ainsi le principe de tout ce qui va suivre. Le film est alors une grande fresque infiniment intimiste, se faisant autant le tĂ©moin de diffĂ©rentes Ă©poques que le portrait d’un homme qui voit le temps qui passe et l’amène inĂ©vitablement vers la mort qui n’a jamais Ă©tĂ© aussi proche de la naissance, et inversement. A de multiples instants, il nous rappelle Ă  cette notion de temps qui passe et aux possibilitĂ©s qui en dĂ©coulent, Ă  l’instar de la mise en scène du dramatique accident de Daisy.

Le film prend ainsi son temps et peut parfois laisser apparaĂ®tre certaines longueurs, mais avec sa photo magnifique et la partition toute en douceur d’Alexandre Desplat, Fincher installe une vĂ©ritable atmosphère invitant Ă  une plongĂ©e dans des souvenirs qui font de Benjamin Button le film le plus « classique » du rĂ©alisateur. Et pourtant, dans sa narration et dans sa rĂ©alisation, avec l’appui d’effets visuels Ă©tonnants qui permettent de retrouver un Brad Pitt vieillissant ou au contraire dans ses jeunes annĂ©es, Fincher s’inscrit dans une certaine modernitĂ© qui confère Ă  son Ĺ“uvre un statut complètement intemporel au sens noble dont le seul dĂ©faut pourrait ĂŞtre son cĂ´tĂ© « intouchable ».

Mais Benjamin Button est aussi sans conteste le film le plus gracieux et romantique de David Fincher. Ici, il met une histoire d’amour aux dĂ©buts impossible entre Benjamin et Daisy qui vont devoir attendre le milieu de leur vie afin de pouvoir vivre pleinement le romance. Brad Pitt et Cate Blanchett y sont sublimes, subtils et touchants, avec une vĂ©ritable alchimie qui nous emporte dans notre envie de les voir vivre ensemble malgrĂ© cette condition impossible, jusqu’aux derniers instants poignants.

Prenant tout le monde Ă  revers avec cette Étrange Histoire de Benjamin Button, David Fincher montrait bien qu’il Ă©tait capable d’autre chose que des films malins et poseurs, du grand cinĂ©ma romanesque et intimiste qui sera pourtant boudĂ©s par les Oscars qui vont lui prĂ©fĂ©rĂ© le Slumdog Millionaire de Danny Boyle, ne laissant alors Ă  Fincher que des rĂ©compenses techniques mĂ©ritĂ©es pour les progrès rĂ©alisĂ©s sur les effets visuels et maquillages toujours au service de l’histoire. Avec plus de 2.5 millions d’entrĂ©es en France et plus de 300 millions de dollars rĂ©coltĂ©s dans le monde, le film sera tout de mĂŞme la plus grande rĂ©ussite financière de Fincher, au mĂŞme niveau que Se7en. Et pourtant, le cinĂ©aste s’engage dĂ©jĂ  dans un nouveau projet risquĂ© et moderne : the Social Network.

publié dans :Cinéma Culte du dimanche

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