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Gatsby le Magnifique, critique

posté le 17/05/2013

12 ans après Moulin Rouge !, Baz Luhrmann est de retour sur le tapis rouge du Festival de Cannes avec les strass, paillettes et stars de Gatsby le Magnifique. Et si l’australien Ă©choue dans la fresque romanesque, il livre un Ă©crin idĂ©al au talent toujours impressionnant de Leonardo DiCaprio.

Gatsby le Magnifique… un nom lĂ©gendaire pour un livre qui s’Ă©tait plantĂ© Ă  a première publication avant de devenir l’un des standards de la littĂ©rature amĂ©ricaine, portrait d’une nation en pleine dĂ©cadence avant la crise de 29. Le succès, c’est donc bien plus tard que l’œuvre de F. Scott Fitzgerald l’a connu mais le cinĂ©ma n’a pas attendu pour porter cette histoire Ă  l’Ă©cran et certains se souviendront certainement de la version avec Robert Redford dans le rĂ´le titre. Mais l’histoire rĂ©sonne encore aujourd’hui dans l’actualitĂ© et il n’est pas Ă©tonnant alors de voir l’extravagant rĂ©alisateur australien Baz Luhrmann s’y intĂ©resser.

En effet, avec sa description d’une sociĂ©tĂ© dĂ©cadente et de la lutte des classes, ses grandes fĂŞtes et son histoire d’amour impossible, Gatbsy le Magnifique a tout de qu’il faut de romanesque pour plaire au cinĂ©aste. C’est donc tout naturellement qu’après l’Ă©chec d’Australia, Baz Luhrmann s’attaque Ă  cette nouvelle adaptation avec le Leonardo DiCaprio qu’il avait rĂ©vĂ©lĂ© dans Romeo + Juliette.

Comme Ă  son habitude, le film commence donc de manière très rythmĂ©e, avec une Ă©nergie dĂ©bordante lors des grandes fĂŞtes organisĂ©es chez les mystĂ©rieux Gatsby dont tout le monde se demande qui il est et d’oĂą vient sa fortune. Les couleurs criardes sur des fonds verts avec de grands renforts de retouches numĂ©riques dĂ©goulinent sur l’Ă©cran … c’est clair nous sommes dans un film de Baz Luhrmann et celui-ci s’en donne Ă  cĹ“ur joie dans sa reconstitution et mise en scène exubĂ©rante.
A tel point qu’il en oublie finalement de nous prĂ©senter ses personnages de manière claire et de porter une vĂ©ritable attention Ă  l’histoire et Ă  son contexte. Bizarrement, ce qui fonctionnait parfaitement dans la folie de ses prĂ©cĂ©dents films a du mal Ă  trouver sa place ici alors que, paradoxalement, la dĂ©cadence ne demandait que cela. A forcer le trait ainsi, on reste alors tout le long du film dans la superficialitĂ© qui est censĂ©e ĂŞtre finalement dĂ©noncĂ©e.

Il est alors bien dommage que Luhrmann s’attarde trop sur son style (oubliant mĂŞme de donner une vĂ©ritable place Ă  la musique devenue ici un fond sonore gĂŞnant) car Gatbsy le Magnifique, c’est aussi l’histoire des nouveaux riches avant la crise, d’une figure incarnant l’espoir typiquement amĂ©ricain au delĂ  de son aspect superficiel et une folle histoire d’amour.
Mais le rĂ©alisateur, prĂ©fĂ©rant se concentrer sur la forme parfois Ă  la limite grotesque de son film (qui n’est pas arrangĂ©e par la 3D), ne capte presque rien de tout cela et passe complètement Ă  cĂ´tĂ© de la fresque romanesque qui l’attendait. MĂŞme si on y met un peu de soi, les Ă©motions ne passent finalement pas alors que l’on en saisit bien tout le potentiel, ce qui est assez frustrant.

Que reste-t-il alors de la promesse de dĂ©part ? Si l’on oublie le rĂ´le agaçant de Tobey Maguire, narrateur de l’histoire, le casting s’en sort plutĂ´t bien, en particulier Joel Edgerton qui dĂ©gage une bonne prĂ©sence menaçante dans le rĂ´le du mari jaloux et infidèle de la frĂŞle Daisy (Carey Mulligan encore dans ce rĂ´le de femme-enfant qui lui colle Ă  la peau).
Mais c’est Ă©videmment Leonardo DiCaprio qui ressort encore grandit de ce rĂ´le de Gatsby le magnifique … ou est-ce Gatsby qui Ă©tait le rĂ´le Ă©crit par Fitzgerald pour l’acteur ? On ne sait plus tant les deux ne font qu’un (le parallèle entre la vie de l’acteur et celle du personnage est presque Ă©vident). ImpĂ©rial, Dicaprio règne en maĂ®tre sur le film de Luhrmann et sa simple prĂ©sence rattrape Ă  elle seule presque tout le film tant il dĂ©gage un charisme innĂ© et un mystère essentiel au personnage. Que ce soit dans son aspect de gamin amoureux maladif Ă  celui plus sombre d’un homme qui ne se laissera pas voler sa vie (piquant alors une crise de colère intense), l’acteur transmet comme personne n’aurait pu le faire cet espoir fou au milieu d’une sociĂ©tĂ© Ă  la dĂ©rive.

Avec Gatbsy le magnifique, Baz Luhrmann ne fait donc jamais dans la demi-mesure et la forme prend bien trop le pas sur le fond pour s’y attacher. C’est dommage tant il y avait matière Ă  livrer ici une grande fresque romanesque sur un personnage passionnant brillamment incarnĂ© par un Leonardo DiCaprio qui prouve une nouvelle fois qu’il est l’acteur le plus douĂ© de sa gĂ©nĂ©ration (et on ne se lasse pas de le dire).

publié dans :Cinéma Critiques ciné

  1. 19/05/2013 Ă  14:06 | #1

    Au contraire je trouve qu’il est mesurĂ©, notamment dans la fĂŞte que Luhrmann aurait pu largement faire plus. Sublime dans la forme et l’Ă©motion est passĂ©e (avec moi du moins !)… 3/4

  2. Anacleto Smith
    24/05/2013 Ă  13:36 | #2

    Excellente critique.
    On aurait prĂ©gĂ©rĂ© un James Cameron aux manettes pour davantage d’Ă©motion.
    Car le seul qui nous touche est effectivement Leonardo DiCaprio, acteur exceptionnel et toujours juste.
    La 3D n’apporte rien et fait ressembler le film Ă  une pièce de théâtre dans laquelle les bolides apparaĂ®ssent anachroniques.
    Un bon moment quand mĂŞme, il faut le dire.