Accueil > Cinéma, Culte du dimanche > Culte du dimanche : La Liste de Schindler

Culte du dimanche : La Liste de Schindler

posté le 19/05/2013

Alors qu’il est enfin devenu prĂ©sident du festival de Cannes, il est temps de se replonger dans l’un de ses films les plus durs, Ă©mouvants et personnels de Steven Spielberg : La Liste de Schindler. Une vraie leçon d’humanitĂ©.

Il en aura fallu du temps Ă  Steven Spielberg avant de s’attaquer Ă  la Liste de Schindler. Alors qu’il a dĂ©couvert le roman de Thomas Keneally Ă  sa sortie en 1982, au moment oĂą il venait de rĂ©aliser E.T. l’Extra-Terrestre, le rĂ©alisateur roi d’Hollywood s’Ă©tait mis en tĂŞte de l’adapter pour le grand Ă©cran. Mais Ă©tant conscient qu’il n’avait pas encore la maturitĂ© nĂ©cessaire pour rĂ©aliser se projet lui-mĂŞme, il chercha alors Ă  le produire avec notamment Roman Polanski ou Martin Scorsese derrière la camĂ©ra. HĂ©las, le projet resta sans arrĂŞt au point mort. D’une certaine manière c’est le signe pour Spielberg qu’il doit le rĂ©aliser lui-mĂŞme et après des oeuvres plus « sĂ©rieuses » comme Empire du Soleil ou la Couleur Pourpre, sa crĂ©dibilitĂ© sur ce type de projet s’est renforcĂ©e.

Pendant toutes ces annĂ©es de dĂ©veloppement, c’est le scĂ©nariste Steven Zaillian qui s’est attelĂ© Ă  la lourde tâche de l’adaptation du roman reprenant l’histoire d’Oskar Schindler et la manière dont il a rĂ©ussi Ă  sauver 1100 juifs de l’holocauste en les faisant travailler dans son usine. Dressant un portrait complexe de l’homme et n’Ă©vitant pas le saccage de Cracovie par les forces allemande, l’histoire de la Liste de Schindler devient sous sa plume et par les personnages qu’il choisit de mettre en avant une vĂ©ritable leçon d’humanisme que Spielberg va s’empresser de tourner dès Jurassic Park en boĂ®te (le rĂ©alisateur n’aurait certainement jamais pu rĂ©aliser Jurassic Park après Schindler, chose qu’avait bien compris le prĂ©sident d’Universal Ă  l’Ă©poque pour lui donner le sens des prioritĂ©s).

Pour la première fois, Steven Spielberg va tourner son film en noir et blanc. Il fait alors appel Ă  un directeur de la photographie qui n’a pas encore eu beaucoup d’expĂ©rience Ă  Hollywood : Janusz Kaminski. Très investi par sa mission, l’artiste technicien sera d’une grande aide au rĂ©alisateur pour donner au film un aspect historique tout autant qu’un cĂ´tĂ© très solennel, inspirant alors un profond respect pour l’homme, les victimes mais sans occulter les horreurs montrĂ©es. Un choix judicieux et fructueux qui n’est que le dĂ©but d’une longue collaboration entre les deux hommes.

Mais au delĂ  de cet aspect « technique », le rĂŞveur Spielberg donne avec La Liste de Schindler une leçon d’histoire, sans doute le film le plus intĂ©ressant sur la Shoah mais aussi le plus poignant, n’hĂ©sitant pas Ă  mettre la monstruositĂ© de certains face au mince espoir qu’il reste pour d’autres. Le rĂ©alisateur fait preuve d’une maturitĂ© et d’un respect immense vis-Ă -vis des victimes et l’on sent que le sujet lui tient fortement Ă  cĹ“ur, respectant au mieux, malgrĂ© quelques libertĂ©s romancĂ©es, l’histoire. Avec des sĂ©quences fortes (la liquidation du ghetto de Cracovie dont la prise pendant lequel Schindler va prendre conscience de l’horreur qui l’entour en voyant cette petite fille en manteau rouge ou encore des exĂ©cutions sommaire par l’horrible Amon Göth), il ose montrer la mort tragique, stupide et cruelle Ă  l’Ă©cran. Et mĂŞme si il n’ose pas montrer finalitĂ© des camps de la mort en face, se ravisant Ă  la dernière minute (la controversĂ©e scène des douches), il Ă©vite alors le voyeurisme outrancier tout en laissant une impression de malaise.

Bien entendu, certains reprocheront toujours Ă  Spielberg de toujours s’attacher Ă  montrer les quelques survivants plutĂ´t que les millions de morts, mais après tout, ce que le rĂ©alisateur cherche aussi Ă  montrer, c’est qu’au milieu de l’horreur, il y a toujours de l’espoir. Nul doute, qu’il en aurait Ă©tĂ© autrement si il avait rĂ©alisĂ© ce film dans les annĂ©es 2000, lorsque sa filmographie est devenue plus sombre suite aux attentats du 11 septembre. Mais le rĂ©alisateur cherche aussi Ă  travers le personnage de Schindler Ă  montrer une certaine prise de conscience.
En ce sens, Ă©paulĂ© par un Ben Kingsley attachant, Liam Neeson se montre grandiose dans le rĂ´le titre. Schindler connait une Ă©volution progressive qui le voit de simple industriel riche et playboy devenir un homme qui veut sauver le plus de vies possible. Cela ne se fait pas en un clin d’œil et il faudra un certain temps avant qu’il n’assume pleinement cette mission sous couvert de faire du profit, si bien que sa personnalitĂ© est toujours assez ambigĂĽe. Et face Ă  la bontĂ© que peut dĂ©gager Schindler, Ralph Fiennes rĂ©vèle toute la monstruositĂ© de son personnage et par lĂ , de l’ennemi nazi, lui aussi plus complexe qu’il n’y parait lorsqu’il commence Ă  s’attacher Ă  sa domestique juive.

Loin d’un manichĂ©isme simple qu’on pouvait lui reprocher avant, Spielberg dresse donc le portrait complexe d’un homme mais aussi d’un contexte historique abominable duquel peut toutefois toujours surgir une once d’espoir et de tolĂ©rance. Le film se rĂ©vèle alors particulièrement fort, poignant tout en nous rappelant une leçon d’histoire Ă  ne pas oublier pour ne pas commettre les mĂŞmes erreurs mais aussi une grande leçon d’humanitĂ© qui a marquĂ© le rĂ©alisateur pour toujours, l’incitant alors Ă  crĂ©er la Fondation de la Shoah pour en rĂ©colter tous les tĂ©moignages. A juste titre rĂ©compensĂ© 7 fois aux Oscars, le film reste encore aujourd’hui une vĂ©ritable leçon d’humanisme dont l’une des phrases clĂ©s « qui sauve une vie, sauve l’humanitĂ© toute entière », rĂ©sonne encore dans les esprits.

publié dans :Cinéma Culte du dimanche

  1. 19/05/2013 Ă  14:04 | #1

    Chef d’oeuvre. Pour faire court la perfection d’un film qui se classe sans soucis dans le top 10 de l’histoire… 4/4