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Culte du dimanche : Boogie Nights

posté le 06/01/2013

Avec la sortie de the Master au cinĂ©ma, il Ă©tait temps de revenir le film qui a fait connaitre le prodige Paul Thomas Anderson, la chronique sur le milieu du porno des 70’s : Boogie Nights.

A l’origine, il y avait un court-mĂ©trage rĂ©alisĂ© alors qu’il Ă©tait adolescent et qu’il s’intĂ©ressait Ă  l’industrie du porno. The Dirk Diggler Story confrontait plusieurs tĂ©moignage pour reconstituer le portrait d’une star fictive du porno. Après un premier long, Hard Eight, qui lui a permis de se faire connaitre dans les festivals, il dĂ©cide de revenir sur l’histoire de Dirk Diggler Ă  travers un long mĂ©trage imposant de plus de 2h30. IntitulĂ© Boogie Nights, il s’agit d’une chronique sur l’industrie du porno dans les annĂ©es 70 et 80, son business et ses destins individuels qui s’autodĂ©truisent.

Le film dĂ©bute ainsi sur un coup de maĂ®tre, Ă  la fois narratif et technique. En effet, PT Anderson ouvre Boogie Nights par un long plan sĂ©quence dans une boĂ®te de nuit qui lui permet de prĂ©senter en quelques minutes les principaux personnages de sa fresque, du producteur Ă  l’actrice star en passant par le propriĂ©taire des lieux, la starlette ou encore le plongeur qui rĂŞve secrètement de devenir une star pour faire quelque chose de sa vie. Prenante et rythmĂ©e par le disco et le funk, cette ouverture place tout de suite les enjeux, l’esprit et l’ambiance du film. On sait dès lors que nous allons voir plus qu’un simple drame, un kalĂ©idoscope qui montrera une facette de l’AmĂ©rique et d’une Ă©poque.

Nous allons donc principalement suivre le jeune Eddie Adams (Mark Wahlberg) qui, pour Ă©chapper Ă  une situation familiale infernale, va profiter de l’opportunitĂ© que lui offre le rĂ©alisateur Jack Horner. Sous le pseudo de Dirk Diggler, il va alors devenir une star internationale du porno et traverser 7 ans de tumultes, des plus grands succès Ă  la descente aux enfers, entre sexe, argent, drogue, trafics, amours artificiels…
Au delĂ  de ce personnage qui reprĂ©sente une industrie du plaisir encore libre, c’est toute une communautĂ© qui est dĂ©crite ici et, Ă  cĂ´tĂ© de Wahlberg, PT Anderson a regroupĂ© un casting assez dingue. On y retrouve ainsi Burt Reynolds dans ce qui est probablement son meilleur rĂ´le et qui sera d’ailleurs fortement rĂ©compensĂ©, Julianne Moore (touchante en actrice cocaĂŻnĂ©e Ă  qui on a retirĂ© son enfant), Heather Graham, John C. Reilly, Don Cheadle, ou encore Philip Seymour Hoffman. Pour la plupart des acteurs que l’on retrouvera dans la filmographie du rĂ©alisateur qui s’est ainsi crĂ©Ă© une famille de cinĂ©ma.

Dans Boogie Nights, on dĂ©cèle dĂ©jĂ  tout ce qui intĂ©resse le rĂ©alisateur : un bout de l’histoire cachĂ©e de l’AmĂ©rique, la destruction du mythe amĂ©ricain, les destinĂ©es dramatiques de personnages multiples, le portrait d’une communautĂ© fermĂ©e. Tout est lĂ , parfaitement maĂ®trisĂ© dans sa narration prenante et parfois touchante et avec une maitrise technique bluffante. C’est simple, on ne voit pas le temps passer et le rĂ©alisateur, sans pour autant ĂŞtre vulgaire ni complaisant, ni trop voyeur, arrive Ă  nous intĂ©resser Ă  ce milieu qui aurait pu ĂŞtre rebutant et Ă  nous attacher Ă  ses personnages. Seul ce dernier plan du hĂ©ros perdu et rĂ©vĂ©lant tout ce qui lui reste choquera autant qu’il sera perçu comme un vrai doigt d’honneur Ă  l’AmĂ©rique qui s’est transformĂ©e et au star system.

ProfondĂ©ment pessimiste Ă  mesure que le rĂ©cit avance, Boogie Nights rĂ©vèle pleinement tout le talent de son auteur et offre un portrait sans far des dĂ©rives de l’AmĂ©rique, du business et du cinĂ©ma qui n’est plus fait par plaisir et qui traite ses stars comme des produits jetables.
L’ambition de Paul Thomas Anderson sera ici payante puisque le film rencontrera un joli succès Ă  la fois public et critique
, faisant du rĂ©alisateur un talent Ă  suivre de très près. D’autant plus que le film sera multi rĂ©compensĂ© dans les cĂ©rĂ©monie cĂ©lĂ©brant le cinĂ©ma indĂ©pendant. Ces louanges lui permettront alors de rĂ©aliser ses films suivants en totale indĂ©pendance avec le fameux director’s cut Ă  la clĂ© et ce n’est que le dĂ©but d’une filmographie passionnante dans laquelle il dĂ©construit Ă  chaque plan le visage de l’AmĂ©rique.

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